ALINE DECROUEZ

Bâtie selon une démarche progressive et expérimentale, ma pratique porte essentiellement sur des questions liées à la couleur, sur des points de vue trouvant leur formulation dans des dispositifs chromatiques et formels.

Qu’ils soient assemblés pour former des peintures volumétriques ou agencés séparément dans l’espace, les monochromes que je réalise visent à interroger les formes de relation que l’homme entretient avec son environnement, mettant en abyme la perception. Le spectateur se trouve face et dans l’expressivité de la couleur. La perception devient expérience. Le spectateur est amené à agir, à se déplacer, pour qu’un point de vue apparaisse : une perspective d’ensemble se met alors en place, un «paysage»... Le monochrome suscite une nécessité de fragmentation et une forme d’organisation. Un imaginaire s’opère là où les tensions se constituent. Ces tensions qui maintiennent une forme d’équilibre - tension interne et mise en tension des différents monochromes - forment un ensemble. La peinture comme écoute du visible.

Chaque ensemble coloré occupe l’espace. Il n’est pas seulement question d’une volonté de construction mais aussi d’approfondissement dans la recherche et l’expérience : le choix des couleurs ne découle pas d’un échantillonnage extrait de la charte des couleurs mais de bases intuitives, de l’observation des couleurs à travers l’environnement du lieu dans lequel mon travail se développe ou s’inscrit. Appréhendant la matière dans un rapport physique, ces couleurs sont élaborées artisanalement à partir de pigments purs ou mélangés. L’approfondissement dans la matière naît de la répétition. L’étalement dans le temps d’une action répétée porte en soi les éléments d’un renouvellement. Urgence d’un présent. Régénération perpétuelle.

Aline Decrouez, 2018